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Reconquérir les rues

Reconquérir les ruesL’auteur, Nicolas Soulier est architecte, urbaniste et professeur d’architecture. L’écriture du livre RECONQUÉRIR LES RUES correspond à ses expériences de travail, depuis une trentaine d’années. Très diverses, elles portent sur la ville, l’habitation et le jardin : projets d’architecture à Paris, projets urbains en province et en région parisienne, enseignement dans le cadre des écoles d’architecture (Versailles, Montpellier, Saint-Étienne et Paris-La Villette), design d’objets et installations artistiques avec Cécile Daladier (atelier Assaï).

L’ouvrage

Pourquoi reconquérir les rues ? Parce que c’est là que se joue, sans qu’on en soit toujours conscient, une grande partie de la qualité́ de la vie dans une ville ou un village. Il y a des rues où l’on se sent bien, des rues vivantes – sans forcément être commerçantes – où l’on se dit qu’on aimerait bien habiter et élever nos enfants. Et puis il y a des rues qui, à l’inverse, nous semblent mornes, stériles, désertes, et qui malheureusement sont devenues plutôt la norme dans notre pays. Pourquoi ?

Nicolas Soulier nous montre que c’est, certes, une histoire de voitures, auxquelles nous accordons souvent une place disproportionnée, mais pas uniquement. C’est avant tout une histoire de vie “spontané” et de cadre qui permet à̀ cette vie de s’exprimer ; que cela tient souvent à̀ des petites modifications qui, quand elles sont accumulées, peuvent avoir de grands effets. En France, la situation parait souvent bloquée, et nombreux sont ceux qui pensent que si le progrès a détruit les rues, il faut s’y résoudre sans nostalgie.

Nicolas Soulier montre que cette situation n’est pas inéluctable et que de nombreux exemples de « reconquête des rues » fleurissent à travers le monde. L’auteur en tire des conclusions pratiques et propose des pistes d’action pour “reconquérir nos rues”.

Les Éditions Ulmer / 2012 8 rue Blanche 75009 Paris http://editions-ulmer.fr

Introduction

Quand nous sortons de chez nous, si les bébés dans les poussettes sont au ras des pneus et des pots d’échappement, si les enfants ne peuvent pas aller tout seul dans la rue ou à l’école, si nous passons beaucoup de temps dans des déplacements fatigants, si les personnes âgées ou désœuvrées ne savent où se mettre, si les services et commerces de proximité disparaissent, on peut s’interroger sur notre habitat. Dès lors que l’on considère les rues comme de simples voies de circulation, où l’on donne presque toute la place aux voitures pour rouler ou pour stationner, alors dehors, dans la rue, nous sommes chez elles, pas chez nous. Mais ce n’est pas qu’une question de voitures. C’est aussi une question de riverains. Pour être vivante, une rue résidentielle a besoin d’être habitée, et non simplement parcourue. Si nous tolérons que la rue devant chez nous ne soit qu’un tuyau pour circuler c’est que nous oublions que c’est un espace qui fait partie de notre habitat. Quand nos habitations se referment sur elles-mêmes et que nous tournons le dos à la rue, nous n’avons plus d’échange avec elle. La rue se retrouve morne. Les riverains la désertent. L’habitat reste figé.

J’ai été conduit à ce constat un peu sombre dans le cadre de ma pratique d’urbaniste et d’architecte, sur la base d’expériences que j’expose dans la première partie de ce livre. On pourrait en venir à penser que cette situation caractérisée par le dépérissement des rues est inévitable, et qu’il vaut mieux se résigner sans vaine nostalgie au fait que la plupart des rues banales de quartiers résidentiels sans commerces ni équipements soient moroses. Mais d’autres expériences, en particulier à l’étranger, nous montrent que des rues résidentielles peuvent être vivantes et donner envie d’y habiter. Elles montrent que la situation peut être différente, notamment quand les habitants contribuent à la vie de leur rue et à sa prise en charge. La rue s’en trouve métamorphosée. Je développe quelques-uns de ces exemples inspirants, et je propose ensuite un parcours dans un choix de rues en Europe, en Amérique du Nord et au Japon, en étant attentif aussi bien aux succès qu’aux échecs qui s’y manifestent. Ces exemples nous montrent qu’il ne faut pas se décourager, et que notre habitat pourrait être beaucoup plus agréable à vivre. Nous pourrions reconquérir nos rues, sans devoir tout démolir ni tout reconstruire. Il faudrait pour cela que nous, les riverains de la rue, ne soyons plus amenés à lui tourner le dos et à nous enfermer derrière des écrans, des murs et des portes pleines. Si nous nous tournions vers la rue, nous pourrions engager des processus très différents, et considérer que la rue, c’est aussi notre affaire. Il est difficile d’influer sur les vastes opérations d’urbanismes. Mais on peut agir concrètement au quotidien devant chez nous, à notre porte : c’est à notre échelle et dans le domaine du possible. Nous les habitants, nous pourrions améliorer les rues dans lesquelles nous habitons, et, pour une part essentielle, nous sommes les seuls à pouvoir le faire. Cela exige que nous trouvions collectivement le moyen de cesser de stériliser nos rues et de bloquer les initiatives.

Ce livre est un essai pour contribuer à cette prise de conscience. Je l’ai écrit en me fondant sur mes expériences d’architecte, d’urbaniste, et d’enseignant, et à l’issue de nombreux voyages ou séjours d’étude. Ce n’est ni un manuel, ni un livre théorique scientifique : plus un compte-rendu d’enquête, un carnet de notes de praticien, une tentative pour donner à voir et fournir des éléments de compréhension, et pour proposer quelques outils et quelques notions à ceux qui s’interrogent, qui se demandent comment débattre et agir, contourner des blocages, et trouver de bons angles d’attaque pour reconquérir nos rues.

L'auteur : La rédaction

Les rédacteurs et photographes du magazine écrivent des paysages et des horizons.

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