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[UNE EXPO – UN CATALOGUE] Aaron Siskind, une autre réalité photographique

En souvenir d’une présentation de l’artiste Aaron Siskind et de son travail au Pavillon populaire – espace d’art photographique de la ville de Montpellier, qu’il aurait fallu voir assurément (octobre 2014 – février 2015) et qui mettait la focale sur la façon qu’avait Siskind de se rapprocher de l’objet jusqu’à l’apparition du motif, d’interpréter le sujet ; quelques photos de son œuvre.

Des clichés à regarder, en partant du principe que l’attention de Siskind ne porte pas tant sur les objets photographiés que sur les relations entre ces objets, et sur la relation induite par l’image entre ces objets et le spectateur. Car que regarde-t-on dans une image si ce n’est la relation qu’elle crée entre nous et le monde représenté ?

Siskind explore le touché visuel

Dans le cadre de cette exposition, en parlant de son travail, Mathilde Arrivé, Maître de conférences à l’université de Montpellier, précisait très justement : “Siskind explore [le touché visuel] dans des surfaces texturées, capables de redoubler le grain du tirage : plis de la peau (Bill Lipkind 33, 1960), papier râpé, déchiré (Kirkland 10, 1949), peinture écaillée (Jerome 21, 1949), trous et rugosités, nœuds ou volutes végétales (Seaweed 8 , 1953), cavités minérales (série « Martha’s Vineyard Rocks », 1954), tissus froissés”.

Les surfaces à lire de Siskind

Elle ajoutait un peu plus loin : “Siskind se met en recherche de surfaces (murs, chairs, terre, sable, écorce, asphalte) sur lesquelles se lisent des inscriptions (coups de pinceau, sillons, entrelacs, biffures) dessinant un étrange alphabet, à la fois enfantin et complètement ésotérique, qui rappelle les graffiti de Brassaï, ou encore ceux de Basquiat, en particulier dans la série des murs de Chicago, que Siskind photographie en 1953, en 1957 et encore en 1960. Mais ses pictographes sont avant tout un désir affiché de parenté avec le langage pictural des Surréalistes (Joan Miro, Paul Klee, Roberto Matta) puis des Expressionnistes abstraits, en particulier Clyfford Still, Barnett Newman, Willem De Kooning, Adolph Gottlieb, et surtout son ami Franz Kline, lui-même inspiré par la calligraphie, auquel Siskind dédie une série (Hommage à Franz Kline, 1972-1975), présentée dans la dernière salle de l’exposition”.

Un Livre

Aaron Siskind, une autre réalité photographique / Auteur : Gilles Mora

Présentation de l’éditeur : Aaron Siskind, photographe, n’a pas eu la chance de ses pairs photographes américains : l’influence de son œuvre n’est pas à la hauteur des très rares ouvrages qui lui sont consacrés. Il était urgent de publier une monographie qui soit autre chose qu’un beau livre illustré.

L’originalité de cet artiste, sans précédent dans la photographie américaine, a pu créer un contresens sur son œuvre, tendue entre l’influence de Walker Evans et celle de l’européen Moholy Nagy. Celle-ci, commencée dans les années 1930 sous le signe d’un réalisme documentaire des plus rigoureux prend, à partir des années 1950, sous l’influence et la fréquentation des peintres de l’Expressionnisme abstrait, une allure résolument abstraite, expérimentale, au formalisme symbolique difficile, exigeant. On a eu du mal à expliquer un passage aussi radical d’une esthétique à une autre. L’ouvrage qui est ici proposé par Gilles Mora tente, de façon exhaustive, d’expliciter ce passage, plus dans le sens d’une transition et d’une continuité prévisibles, que d’une coupure inexplicable. Il resitue dans le contexte des années 30 et de la Grande Dépression, le travail d’élucidation mené par Siskind – en particulier dans le cadre de la très politique Photo League- autour des usages de l’image documentaire, marquée, dès ses débuts, par un souci de maîtrise de la mise en forme, plus que par celui de l’anecdote. Puis, s’appuyant sur des projets intermédiaires, qui, à partir des années 40, rendent compte de son attraction pour la photographie vernaculaire et d’architecture, il décrit le trajet de Siskind, enseignant au New Bauhaus de Chicago (Institute of Design), puis à la Rhode Island School of Design, ami de De Kooning ou de Franz Kline, vers une photographie dont l’abstraction maîtrisée s’ancre, en définitive, dans un réalisme photographique jamais repoussé, mais utilisé de façon photographiquement différente. Siskind n’apparaît nullement par un photographe tenté par la peinture, mais passionné par la confrontation des deux mediums, sans jamais renier le sien, qu’il pousse vers de nouvelles voies. Ses voyages dans le monde entier sont alors le prétexte à un relevé de signes ou de configurations graphiques empruntant aussi bien au formalisme symbolique de Weston, qu’au surréalisme subtil de Frederick Sommer, et se rapprochant de l’ « Objektive fotografie » européenne. Monographie officielle réalisée à partir des archives d’Aaron Siskind, déposées au Center for Creative Photography de Tucson, avec l’appui de la Fondation Aaron Siskind de New York.

Édition : Azan – Collection : Catalogues d’exposition / Date de parution : 01/10/2014

 

L'auteur : La rédaction

Les rédacteurs et photographes du magazine écrivent des paysages et des horizons.

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