Marcher dans les paysages d’un roman, est une façon d’entrer dans l’histoire qui nous est racontée par l’auteur. Car en littérature le paysage n’est pas qu’une copie des lieux, de nos espaces habités, de nos déserts. Le paysage“ inventé” par l’auteur est tout autre.
Pour Christian Helmreich, Maître de conférences à l’Université Paris 8 [discipline : études germaniques] « La description fidèle d’un paysage relève davantage du genre du cadastre que de celui de la littérature ». Et d’une autre façon, Christine Baron, Professeur de littérature à l’Université de Poitiers, écrit dans «Littérature et géographie : lieux, espaces, paysages et écritures », un Dossier qu’elle rédige en mai 2011 pour la revue web “Fabula-LhT” : « Que les textes littéraires parlent de lieux, de paysages, construisent des imaginaires du lieu est une quasi-évidence. Géographie et littérature apparaissent donc en un sens, le plus naïf, dans un rapport d’inclusion réciproque. (…) Réciproquement, la littérature comprend une dimension géographique liée à sa vocation représentationnelle, et plus spécifiquement dès lors qu’elle se préoccupe de faire partager au lecteur une expérience du voyage, de la découverte des espaces, de l’altérité anthropologique. »
Quant à l’écrivain Patrick Deville, il constate que « certains auteurs ont le goût à saisir les paysages, à décrire les ciels ou les rues, les fleuves, et qu’un agencement de phrases parvient à installer dans notre imagination des lieux que nous n’avons jamais vus ». Il précise : « Qu’elle soit ou non au cœur du projet littéraire, la description du paysage emplit les romans et les poèmes, paysages naturels ou urbains, sublime des cimes et des volcans ou des forêts ou beauté périphérique, gares et voies ferrées, architectures et monuments des villes. Parfois les lieux ne sont que les cadres d’une action, parfois au contraire l’action semble un prétexte à l’entreprise de transformation en langage, en mots, de la réalité visuelle ou sonore, olfactive, où elle se déploie. » Dans “Recommandations aux promeneurs”, de Jacques Réda, un passage : « D’un côté les grosses pièces de céréales coulant sur le revers du plateau, de l’autre, une dégringolade de bois et de prairies vers l’espace vaporeux de la vallée. » [Recommandations aux promeneurs, p.111, Jacques Réda, édit. Gallimard, 1988]. La description de l’auteur s’appuie ici sur les points névralgiques, les lignes de partages et de fractures. Et nous y sommes. Pour un autre auteur encore, Patrick Drevet, l’écrivain approche le paysage autrement qu’un géographe. En quelque sorte le paysage entre dans la scénographie de l’ouvrage, et cela dans une coloration particulière. Il ajoute que « l’espace parcouru ne devient espace de plaisir ou de jouissance que dans la mesure où il nous est devenu intelligible. »
Dans le roman l’écriture inclut l’affectif. Le paysage nous est alors présenté comme une organisation spatiale vécue ou simplement traversée, évitée. On entre alors dans le paysage sensible, dans le paysage psychologique, celui qui est constitué d’habitudes qui s’expriment.