Les prix élevés de l’achat immobilier et les difficultés croissantes de se loger en ville suscitent de nouvelles façons de construire et d’habiter.
Alors, dans la plupart des grandes villes d’Europe, des expériences d’autopromotion se mettent en place. Des « groupes en autopromotion » se forment ; des particuliers se réunissent pour faire construire ensemble un immeuble dans lequel chacun habitera chez soi. On appelle ces groupes d’autopromotion , « baugruppen » en Allemagne.
L’autopromotion part en effet d’une idée simple : celle de particuliers qui se regroupent afin de concevoir, de financer et de réaliser ensemble un projet immobilier, conçu pour répondre aux besoins d’espace, aux attentes sociales ainsi qu’aux possibilités de financement de chacun. Un groupe se compose ; ses membres ont la volonté de vivre (habiter/travailler) autrement et de s’approprier dans la ville, un lieu de vie agréable et ouvert dans une gestion raisonnée de l’espace famille et communautaire. Ils se regroupent aussi en raison d’un hobby commun ou simplement d’un besoin de convivialité avec un voisinage choisi. Les projets immobiliers qu’ils élaborent, se font après une adhésion du groupe à un ensemble de principes communs. C’est en premier lieu ce qui définira la nature de l’ouvrage à construire et son organisation communautaire et privée.
Dans cette nouvelle voie, il n’y a pas de standard ; l’acte d’habiter est privilégié. Il y a dans la conception du projet une volonté d’harmoniser espaces communautaires, mutualisés et privatifs, tout en respectant au mieux les exigences de chacun dans leurs besoins et attentes. De même que l’architecture de l’immeuble peut être plus soignée, grâce aux économies d’échelles réalisées dans le projet commun, des lieux mutualisés peuvent aussi s’intégrer dans le projet. Il peut s’agir d’une laverie, d’un atelier, d’une salle de musique, d’un espace d’accueil pour les amis, de jardin ou potager, d’aire de jeu… Dans cette convivialité choisie, l’habitat est conçu pour une réelle intimité et une attention à la communauté de voisinage.
Il y aurait chez les adeptes de l’autopromotion un désir de prendre en charge son besoin en logement, d’effacer les standards de la promotion immobilière, de choisir sa mixité sociale. Le vivre ensemble est aussi dans la nature des projets d’autopromotion. Les auto-promoteurs veulent un cadre de vie physique et social, le droit d’habiter dans un espace choisi.
Dans certains pays d’Europe, des quartiers entiers se sont construits ainsi et l’autopromotion est même devenue une manière « normale » d’accéder à la propriété. Pour les communes qui encouragent les actions d’autopromotion, les intérêts sont multiples. Bien au-delà de la simple expérimentation, l’autopromotion permet de maintenir des familles avec enfants en centre ville, de permettre une certaine mixité sociale et enfin de favoriser la réhabilitation et la valorisation de quartiers.
Pourtant, la réalisation d’un projet de construction ou de réhabilitation en autopromotion n’est pas chose si facile à réussir ; de nombreuses tentatives isolées se soldent par des échecs. Alors des associations locales « d’habitat groupé en autopromotion » se sont créées dans plusieurs villes de France. Ces structures fédératrices ont principalement pour objectif de regrouper particuliers et projets. Dans ce premier travail, la convergence de projets permet la validation de valeurs partagées, du lieu de construction du projet, d’une typologie architecturale, ainsi que la définition des bases économiques et juridiques nécessaires à la construction de l’ouvrage.
Dans ces projets d’un futur vivre ensemble, il y a alors le début de l’histoire d’un projet commun de construction entre futurs voisins, une histoire peu commune de voisinage que l’on aura choisi ; le début d’une histoire d’un lieu que l’on racontera à ses petits enfants.
Texte : Xavier Guillon
Illustration : Studio G100