Léon, c’est le nom que nous avons donné à ce lion majestueux qui a passé la majeure partie de sa vie sur une pile de portail d’un pavillon de la banlieue de Tours. Et comme toujours le monde change, un matin de juin, une pelle mécanique déstabilise l’évidence d’un passé. Nous étions là pour sauver Léon in extremis. Nous l’avons emmené dans un lieu mieux protégé des promoteurs. C’est notre Léon que nous avons photographié pour vous parler de “ceux qu’on installe chez soi”.
Plus encore, il nous fallait parler de cet objet que l’on ramène d’un voyage, qui a été offert, qui nous vient par héritage ou qui rappelle l’enfance. Amené ou imposé, le souvenir s’impose. Il faut l’accepter, le respecter. Alors, comment intégrer cet objet dans le jardin ? Quel sens lui donner ? Comment faire adopter l’objet par le milieu qu’il intègre.
L’objet de nos envies
Pour comprendre l’objet, il faut être réceptif, le toucher, le vivre. Il a une raison d’être, une identité, une nature. Il faut aussi le projeter et déceler ce qui pourrait rendre son acclimatation difficile. L’attention en fait l’esthétique.
Le jardin formel, carte sensible
L’objet est lié aux autres détails. Il faut donc, avant de l’introduire, comprendre le jardin. « S’assoir » pour regarder le jardin vivre, s’en imprégner. Dès le premier contact avec le terrain, la présence d’éléments structurants s’impose comme dynamique signifiante (végétaux, objets, constructions). Il y a ensuite les ambiances ressenties. Il y a enfin les composants d’ordre et de désordre qui s’opposent et se complètent. Le jardin dans son état est-il déjà espace d’accueil ?
Jardin d’acclimatation
Cet objet que l’on introduit dans le jardin est d’abord un intrus. C’est un petit morceau (un détail) qui doit permettre de mieux apprécier l’espace. Il doit être magnifique et se fondre. Par son arrivée, un nouveau dialogue se construit.
Ce détail qu’il faut parfaire
Parce que chaque objet placé dans le jardin est un détail lié aux autres détails du paysage, il faut lui donner une dimension. Il ne cache pas, n’enferme pas. Il ouvre sur une nouvelle interprétation. Selon, il conforte, il renverse. Ce nouveau détail peut tuer. Il faudra peut-être détourner la nature d’être de l’objet, prendre le contrepied. Jouer la carte de l’imprévu, étonner, surprendre. Tourner l’objet en dérision pour qu’il représente quelque chose et qu’il n’encombre pas.
Adoption plénière
Chaque détail du jardin est une ponctuation qui nourrit le tableau ou l’en détourne. Cet objet, on le montre, on le cache. Il n’entraine pas, il est positif. Sa rencontre conforte au quotidien, d’autant plus qu’il a sa place. Mis en situation, une fenêtre s’ouvre dans le jardin.
Avec les photos d’Emmanuel Brousse