Tout commence par l’achat d’une maison à construire dans un nouveau lotissement. Après avoir validé les plans avec le maître d’œuvre, le choix des entreprises est fait, le planning général des travaux est en cours d’élaboration, l’implantation de la maison reste à faire. Avec quelques membres de la famille ou des amis, il y a eu ces deuxième, troisième et quatrième visites du lieu, pour juste se convaincre que bientôt, il y aura là “le chez-soi” tant attendu.
Pour le jardin, il y a bien-sûr pour certains, la possibilité de se faire assister de professionnels. D’autres préfèreront une création toute personnelle ou réalisée avec l’aide d’amis. Beaucoup diront : “lorsque tu en seras au jardin !” Et pourtant ce n’est certainement pas demain qu’il faudra y penser, si l’on veut que ce jardin devienne vite un lieu à vivre.
Penser le jardin
On le sait tous, le jardin est une pièce ; il a une surface et des limites. Il faut alors (comme pour toutes les autres pièces de la maison) le penser, en définir les utilités, en appréhender les espaces d’utilisation, en dessiner les formes… Le regard, tel une vague, doit y chercher les criques. Il y a donc en amont (avant le démarrage des travaux sur le site) un premier travail de définition du projet. Que doit-être ce jardin ? Qu’elle en sera son utilité ? Ses utilités ?
Y revenir
Et puis revenir plusieurs fois sur le terrain pour visualiser et porter sur le plan de masse les éléments situés à proximité du terrain : mur voisin – pignon maisons voisines – végétation – horizon visible – les choses à cacher – ce qu’il ne faut surtout pas cacher… C’est important car ce premier travail permet aussi de définir les zones utiles qui doivent s’intégrer dans l’espace : accueil – stationnement des véhicules privés et amis – circulation sur le terrain – réception – relaxation – cuisine extérieure – aromates pour la cuisine – potager – verger – compostage – stockage du bois – stockage des outils de jardin… Le fil conducteur de l’aventure est de concevoir son jardin dans la globalité et les détails. Il faut y intégrer la nature et l’ensemble des volumes environnants. Cette balade in situ permet de faire éclore progressivement l’esprit du jardin, d’en définir les sens et son cœur. Il y a tout autour des constructions, des jardins, des arbres et autres végétaux. Il faudra en tenir compte et pour cela l’enregistrer en préalable. Ce travail permettra aussi de définir les espaces à couvrir et les espaces à ouvrir.
Premiers mouvements
Les travaux commencent. Il est important dès maintenant de faire équipe avec le terrassier (qui n’attend qu’un geste de reconnaissance pour nourrir le tissu coopératif). Avant le premier coup de pelle, il va falloir organiser avec lui le mouvement des terres, isoler la bonne terre de la mauvaise. Il faudra être présent. Et lorsque celui-ci sera intervenu, il sera alors nécessaire de bien délimiter l’espace chantier pour la construction de la maison de l’espace réservé aux travaux du jardin. Selon la nature du terrain, il y a peut-être de la pierre à récupérer (pierres, caillasses), qui deviendra utile pour la réalisation de certains ouvrages paysagers. Cette pierre récupérée sera stockée à l’arrière du terrain. La bonne terre sera elle aussi reposée à l’arrière de la maison ; la mauvaise terre sera déposée à l’avant, prête à être évacuée pour l’essentiel. Il est temps d’acquérir une excellente brouette de maçon, une pelle, une pioche, une pelle-bêche, une fourche-bêche. Pas plus. A chaque type de travaux un outillage de qualité et adapté. Il faudra aussi abriter tout ce matériel. Alors pourquoi ne pas dès maintenant construire un abri ? Ce qui est fait est fait.
Seconds mouvements
Par tous ces mouvements et dépôts, une organisation se met en place. Déjà le jardin prend vie ; il n’est plus la friche ou le terrain pauvre que l’on a connu au tout début de son acquisition. D’autres travaux de remise en fraîcheur ont été engagés à l’arrière de la maison (fauchage, élagage et autres coupes), un lieu de compostage a été créé au fond du jardin. Les végétaux y sont déposés ; le bois coupé est déjà rangé. Quelques ébauches d’esthétisme jardinier voient le jour. Au fur et à mesure de l’avancement des travaux, d’autres matériaux seront récupérés. Le monde des travaux révèle bien des surprises. Alors, par ci…par là, nous prendrons un peu de tout, très peu de rien, des choses qui traînent, comme des palettes, des parpaings, de la brique, de l’ardoise, de la tuile, du basting, des ferraillages, des chutes de carrelage et de faïence, et même des chutes de moquette, de tuyaux PVC… Et oui, nous participons au recyclage des déchets. Des idées maintenant nous viennent par les chemins d’inspiration pour faire éclore nos envies de demain. Il n’y a qu’à croquer. L’asymétrie est privilégiée. Les pierres redonnent vie aux végétaux. Incontournable, le bois crée l’ordonnance et l’harmonie. Les formes s’émancipent dans l’irrégularité du minéral et du végétal. Les volumes, les courbes et les couleurs, c’est ce qui doit se perdre dans le jardin. Le défi, c’est que notre personnalité puisse être perçue en filigrane dans l’œuvre finale.
Le jardin se construit
Il faut maintenant s’inspirer de la nature environnante et tenter d’harmoniser le jardin avec le paysage présent dans sa proximité. En juin, il a été semé de la “prairie fleurie” sur quelques espaces ensoleillés à l’arrière du terrain. Jusqu’en septembre les fleurs de la prairie rappelleront que l’été est encore là. Il y aura aussi dans cette composition champêtre, un retour au passé, un fleurissement à la “Van Gogh”. Dès la première fauche, le compost a été créé en fond de jardin. Il servira à l’amendement du jardin. Les coupes, les mauvaises herbes vont y trouver une nouvelle vie. Et puis surtout ce compost est à nourrir ; dès la fin de l’été et en automne, les feuilles mortes et les vieux fruits sont à collecter (on les aura même collectés en dehors de chez soi). C’est une petite nature d’automne qui va ainsi être créée. Les tons au loin seront en dégradés d’ocre et de brun. Quelques arbustes (type lilas) ont été plantés en bordure. Un muret en pierres sèches protège encore le compost. Cet espace est aussi un condensé de campagne. Les quelques arbres en place, ont été élagués et entretenus. Quelques uns ont dû être abattus. La végétation “sous-bois” a été préservée. Le bois de coupe a été stocké à proximité pour favoriser l’esprit d’automne.
Au jour de la crémaillère
La maison en construction est sur la partie avant du terrain. Alors, en guise de haie, des arbres fruitiers ont été plantés dès que cela a été possible. Les fruits, c’est bon pour la santé, et pour la vue aussi… C’est aussi une inspiration de campagne, un patchwork de fleurs et de fruits. D’autres essences les accompagnent, qui rappellent la végétation lointaine, pour qu’il n’y ait plus le près, le loin ; mais seulement un paysage. Ces arbres plantés, ce sont de petits sujets ou des sujets moyens. Ils ont le temps de grandir. Il faut juste leur laisser suffisamment de place. Des touffes de cassis, groseilliers, framboisiers, myrtille sont à proximité pour les plaisirs gourmands. Il y en a pour tous les goûts ou pour les confitures. Il y a aussi, le potager que l’on a déjà bêché dans un bon coin d’ensoleillement. Déjà l’allée, pour la circulation principale dans le jardin est en cours de construction. Elle borde l’espace réception. En fond de sol, des débris de matériaux du chantier ont été étendus (parpaings, brique, carrelage…) ; la caillasse a été déposée sur le dessus. Dans l’attente d’une construction plus durable, une “terrasse palettes” est construite à proximité de la cuisine pour des petits déjeuners ensoleillés et pour le repos.
Plus tard, d’autres travaux seront à réaliser aux abords de la maison. Il faudra penser aux enfants et à tous ceux que l’on aime. Le devant de la maison devra affirmer l’accueil. Le jardin est en mutation. Au fil des mois et des visites, de nombreuses plantes, arbres et arbustes ont été donné par les amis et la famille. Au gré des envies et des récups’ une tendance est en naissance.
Photos : François Lison et Xavier Guillon / Sauf photo du compost : Hélène Thomas / Sauf photo de la terrasse en planches de palettes : anonyme sur le web
A vous lire je me croirais dans le jardin de ma mère, le petit jardin naturel qu’elle a créé il y a plus de cinquante ans dans un terrain argileux très ingrat. Et, croyez-moi, c’est le plus beau compliment que je puisse vous faire.
Très touché de vous avoir rapporté des images, des couleurs, des odeurs, des sensations ; sincèrement et merci pour votre commentaire si plaisant.