Par tradition dans nos villes, nos bourgs et nos villages, les maisons bordent les rues. Leurs portes ouvrent sur l’espace public. Elles ont “pignon sur rue”. De la maison, on regarde la rue par la fenêtre ou le balcon. On ajoute une terrasse ou un perron pour mieux profiter de ce qui se passe à l’extérieur. La façade participe au paysage et au langage de la rue. Elle favorise l’habitation de l’espace urbain, de la rue, lieu commun et d’échange.
La façade ayant intégré l’espace commun, de façon immédiate ou non, la rue et ses abords nous interrogent. Florence Pizzorni-Itié, conservateur du patrimoine, écrit : “Seuils et portes d’immeubles, portails d’ateliers ou devantures de boutiques, c’est là que chacun s’évertue à combler le vide de la rue, en donnant à voir une part de son intimité qui cache l’autre que le passant cherche à capter (…)”
Si la rue est née de constructions qui en ont rapidement attiré d’autres dans leur suite, elle devient surtout le prolongement civil de la vie privée. C’est elle qui fait aussi que l’on a pignon sur rue. Lieu de la quotidienneté, d’échange et de discussion, la rue offre aux façades ses points de vue et la scène. Par son animation, par le choix de son mobilier urbain, elle leurs apporte une coloration, les rend fades, discrètes ou marquées.
Avoir pignon sur rue : Du XVe au XVIIe siècle, la façade des maisons en ville, souvent étroites et construites en bois et torchis, comportait en haut un pignon, généralement triangulaire, destiné à supporter l’extrémité de la poutre principale (faîtière) de la charpente. Avoir pignon sur rue, c’était donc posséder une maison ou un commerce en ville. La façade sur la rue et son pignon étant les parties les plus visibles de la maison, les gens aisés ne se privaient pas de la décorer, en fonction de leurs moyens, pour afficher leur niveau de richesse. Au XVIe siècle, le sens de l’expression a alors évolué pour désigner des gens qui possédaient des immeubles et des biens, ou des riches commerçants.
Avec les photos de Gaspar Païva