Un livre de Jean-Luc Debry aux Éditions L’échappée – 2012
J’avais bien apprécié le résumé que j’avais pu lire sur le plat verso du livre que je venais de sortir d’une étagère de la bibliothèque dans le rayon “sociologie urbaine”.
“Les zones pavillonnaires, affublées à l’occasion du joli nom de lotissement, envahissent inexorablement les abords des villes et des villages, selon un modèle administratif et économique qui, indifféremment du lieu, se reproduit à l’identique (…) L’espace, quadrillé, découpé en plans de circulation, repose sur une logique de flux. La notion de « ville » – et bientôt de « campagne » – s’efface. Désormais réduites à leur centre historique, les villes sont cernées par des zones spécialisées : industrielles, commerciales, résidentielles, vertes, de loisirs…”
J’ai donc pris le livre, et je l’ai ouvert convaincu qu’il répondrait aux multiples questions que je me pose régulièrement au sujet de ces lotissements qui se construisent un peu partout sur notre territoire. Sauf que… comme d’autres qui l’ont lu, je n’ai pas bien établi de rapport entre le titre et le sujet traité. Dommage, j’en attendais tant. Une fois n’est pas coutume, j’ai recherché quelques critiques amies ; j’avoue que je n’en ai pas trouvé. C’est troublant.
J’en ai donc choisi trois, que je vous livre :
Sur le blog de Dissidences dans un compte rendu de Jean-Guillaume Lanuque rédigé en octobre 2012 : (extrait) “Le hic, c’est que Jean-Luc Debry finit par être caricatural et simplificateur, en ayant tendance à mettre tous les individus petit-bourgeois dans le « même sac », évacuant la complexité du positionnement de chacun et témoignant d’un pessimisme crépusculaire.”
Sur le blog W O D K A en octobre 2012 : “ La couverture et le titre de l’essai de Jean-Luc Debry font croire que vous vous documenterez sur ce sujet. Il n’en est rien ! C’est un produit trompeur (…) Autrement dit, le propos de J.-L. Debry est essentiellement fondé sur des généralités portant dénonciation de l’ordre social et de la propriété… Aucune étude de terrain, aucune étude de cas! (…) En revanche, certaines pages sont assez bien vues, mais sur d’autres sujets que l’espace pavillonnaire! Deux exemples à retenir : la rue piétonne (page 136), le village témoin (page 141). La rue piétonne est justement ce qu’il manque dans une zone pavillonnaire, davantage vouée aux voitures qu’aux piétons : l’ironie fait mouche quand l’auteur évoque ces aménagements très marqués par des effets de mode. Quant au village témoin — mais pas le pavillon témoin qu’il aurait été judicieux de visiter — il donne l’occasion d’une réjouissante présentation critique du « revival » villageois que le tourisme favorise loin des concentrations urbaines : c’est « le mythe de l’âge d’or d’une ruralité heureuse ». Le village « s’autoproclame fleuri » et le visiteur ne risque pas d’être « géné par l’odeur d’une étable en activité » : il n’y a plus de paysans dans ce village, leurs noms figurent sur le monument aux morts. Les libraires ne peuvent tout lire, hélas. Trouvé à la rubrique « sociologie urbaine », l’ouvrage aurait mieux sa place au rayon des lectures dispensables.”
Mais aussi dans Le Monde diplomatique, dans un article signé par le philosophe Thierry Paquot : “Et si le rêve pavillonnaire se révélait un cauchemar ? C’est la conviction de l’auteur, pour qui le lotissement est l’expression d’une idéologie — l’individualisme —, d’une classe sociale — les couches moyennes de la classe… moyenne — et d’un mode de vie — la consommation standardisée. D’une écriture rapide et efficace, cette dénonciation du « huis clos de l’ego » rend sensible à la désolation d’une architecture répétitive, à l’isolement scandé par la visite rituelle au centre commercial, à l’infantilisation de cette population endettée inquiète au moindre soubresaut des taux d’intérêt. L’autoroute et son aire de repos, les mêmes enseignes aux abords des villages pourvus d’un même inutile rond-point, les rues piétonnisées dotées d’un mobilier urbain qui pastiche la « vraie ville » du passé : ces propriétés privées se privent surtout de l’autre, de la diversité, de l’imprévu, du désordonné. Ici, tout est attendu, discipliné, hygiénique, surtout le « repas de quartier » ! On est loin de la bicoque bricolée de banlieue, de la maison bachelardienne, de ces lieux parfois pauvres mais où les éclats de rire sont comme des étoiles en plein jour.”