Ces derniers jours à Carcassonne, l’artiste Felice Varini a “accroché” sa dernière œuvre sur les remparts de la ville. Une œuvre qui produit un effet sonar en émettant une “impulsion graphique” et qui sait si bien jouer avec la distance et l’espace. “Un dessin qui se propage comme une onde, fragmentant et recomposant la géométrie des cercles sur les tours et courtines des fortifications”, comme on peut le lire sur le site de la ville de Carcassonne. Il n’en fallait pas plus pour m’inviter à arpenter ses anamorphoses et autres projections de formes.
Ce point qui fonctionne comme un point de lecture
Le travail de Felice Varini, je le connais (comme beaucoup) pour l’avoir croisé, ici ou là. Et cela aurait pu suffire. Loin de là ; car comme l’a si bien écrit Sébastien BAZOU en 2010, le cofondateur de l’association ARTEFAKE qui a pour but de mettre en avant l’art de l’illusionnisme sous toutes ses formes artistiques : “Ses interventions transforment l’acte de voir en une expérience vécue. C’est l’œil qui construit l’œuvre. C’est à partir d’un point de vue que le spectateur est amené à trouver des formes peintes qui se révèlent. Mais si celui-ci s’écarte de ces coordonnées invisibles, l’ordonnance des choses à nouveau se disloque pour lui donner à voir l’éclatement des formes dans l’espace”. J’ai donc eu l’envie de devenir cet “arpenteur” imaginé par l’artiste ; j’ai voulu entrer dans l’œuvre, et cheminer vers le point de vue préalablement déterminé ; ce “point de vue [qui] va fonctionner comme un point de lecture, c’est-à-dire comme un point de départ possible à l’approche de la peinture et de l’espace” précise Felice Varini qui ajoute que “la forme peinte est cohérente quand le spectateur se trouve à cet endroit”.
En partant d’une situation réelle, “ici et maintenant”
J’apprécie particulièrement la relation qu’entretient l’artiste avec l’architecture et le paysage. À ce propos Felice Varini précise même : “ L’espace architectural, et tout ce qui le constitue, est mon terrain d’action. Ces espaces sont et demeurent les supports premiers de ma peinture. J’interviens in situ dans un lieu à chaque fois différent et mon travail évolue en relation avec les espaces que je suis amené à rencontrer. Pour construire ma peinture, je pars d’une situation réelle. Cette réalité n’est jamais altérée, effacée ou modifiée, elle m’intéresse et elle m’attire dans toute sa complexité. Ma pratique est de travailler « ici et maintenant ». “Mes œuvres s’attachent à offrir un espace scénique. Elles invitent en quelque sorte, le spectateur à entrer dans le tableau, et à en devenir partie prenante” nous dit l’artiste… à entrer dans le mouvement.
C’est cela le travail de Felice Varini, et en définitive – comme l’écrivait Marie Marques en 1998 sur le site de l’artiste – “ les oeuvres de Felice Varini sont des pièges optiques jubilatoires qui fixent la relativité de l’espace et du temps”. Et ses installations ouvrent les perspectives davantage qu’elles ne font obstacle à la vue.
Photo à la une : Varini accroche à Carcassonne – Photo Patrimoines Midi-Pyrénées – Région Occitanie Pyrénées-Méditerranée /puis, “Concentrique, excentrique – Cité de Carcassonne 2018”, une photo de Benjamin sur Benoblog.com / “Suite de Triangles – port de Saint-Nazaire” une photo de Founzy / Autres photos : Felice Varini
En savoir plus sur l’artiste, voir : http://www.varini.org/