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Expo "Les quartiers de la ville de Tours" - Photo Gaspar Païva 2013

Le patrimoine architectural en question. Mais serait-il le seul ?

Si l’on s’en tient à la définition que l’on trouve dans nos dictionnaires, le patrimoine est ce que l’individu acquiert par héritage. Il aurait donc le droit d’en user et d’en abuser. Oui, mais cela n’est plus d’actualité. Le patrimoine ne voyage plus seul. Il s’accompagne d’un adjectif qui lui enlève toute possibilité d’indépendance et même d’exception à ce qui l’entoure.

La reconnaissance – Photo François Lison

Pourquoi en sommes-nous arrivés là ? Très certainement parce qu’une société construit son histoire et que pour que pour que cette histoire soit en pleine cohérence avec le monde présent, il lui faut des références lisibles, des attestations crédibles d’une vie sociale passée harmonisée. Alors, faute d’avoir pu bénéficier d’un lobby fort sur ses façons de faire (la maison Picassiette à Chartres soutenue par des artistes reconnus…) qui permet d’accepter l’exception au profit de l’enrichissement du patrimoine culturel, le bien individuel ne vaut pas un kopek pour l’État et généralement pour les collectivités territoriales.

La construction d’un héritage intact ou augmenté

« Ur-Alep » de Claudine Dumaille – Acrylique sur toile – photo Xavier Guillon

Mais ce n’est pas fini. Pour les théoriciens qui se sont emparés de l’espace public (et privé), “le patrimoine fait appel à l’idée d’un héritage légué par les générations qui nous ont précédés, et que nous devons transmettre intact ou augmenté aux générations futures, ainsi qu’à la nécessité de constituer un patrimoine pour demain. On dépasse donc largement la simple propriété personnelle (droit d’user « et d’abuser » selon le droit romain). Il relève du bien public et du bien commun.”(Source Wikipédia). Là, on se dit à première lecture : J’adhère ! Car oui, quelle belle idée que de transmettre un “héritage intact ou augmenté”. Mais ce qui coince, c’est que pour ces gens-là, le patrimoine ne relève que du bien public et du bien commun.

Le patrimoine n’accepte aucune parenthèse

Quid alors du patrimoine créé par cet original, par cet inventeur, par ce bon père de famille… Eh bien, il n’y a rien à en dire. Son projet n’a pas été repris de son vivant. Il est hors du commun tout simplement. Il est donc voué à la destruction. Le patrimoine n’accepte aucune parenthèse. Mais ce qui encore est douloureux, c’est lorsque la notion de patrimoine l’emporte sur l’évidente nécessité de construire dans des formes et des matériaux adaptées à nos besoins (d’usage et écologiques). Une façon de construire qui pourtant avait toujours existé puisque si l’on reprend l’histoire de la construction de nos maisons, on constate un immédiat rapport entre matériaux et formes. Un rapport aussi entre climat, forme et matériaux. Il faut bien le savoir, toute construction individuelle n’est que tolérée. Ce que l’on projette de construire est immédiatement confronté à l’existence d’autres biens inscrits à proximité (durablement ou provisoirement) qui l’obligeront à avoir une “allure acceptable”.

Notre société ne sera illustrée que par des façades publiques, seules preuves de son existence ? L’architecture en est cruellement blessée. Le culte du patrimoine est un poison qui a détruit son imaginaire.

Pour mieux comprendre l’évolution de l’approche patrimoniale au fil du temps, lire dans l’encyclopédie en ligne Larousse, l’article “patrimoine” http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/patrimoine/77550

L'auteur : Xavier Guillon

Rédacteur en chef et en os et profiteur d’espaces, il aime l’urbain et le crie haut et fort. En secret, il rêve de nature et prend régulièrement les chemins vicinaux.

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