Accueil > Vagabondages > Mais pour qui donc le CIRS serait-il un trésor ?
Une bien belle histoire ?

Mais pour qui donc le CIRS serait-il un trésor ?

Le Centre d’Interprétation du Roc aux Sorciers rouvrira-t-il ses portes au public dans les semaines à venir ? Aucune réponse en tout cas, ce samedi 5 mars 2016, car “les élus brillaient cette après-midi par leur absence” comme l’a si bien fait remarquer le journaliste Jérôme Vilain de FR3 Poitou-Charentes. Quoi d’autre à ajouter ? De grands spécialistes de la préhistoire ont, eux pris le temps de venir. Ils sont mêmes pour certains venus de loin…

L’office de Tourisme d’Angles sur l’Anglin est fier de son trésor

Un village impliqué. Et comment !
Un village impliqué. Et comment !

Pour la commune d’Angles sur l’Anglin et la communauté de communes des Vals-de-Gartempe et Creuse c’est une fierté d’avoir sur son territoire l’un des sites majeurs du monde magdalénien. D’ailleurs, sur le site “Angles sur l’Anglin”, propriété de l’Office de Tourisme d’Angles-sur-Anglin réalisé avec la participation financière du Conseil Général de Vienne, qu’est-il écrit ? Rien de moins que “ Angles sur l’Anglin, l’un des Plus Beaux Villages de France, abrite un trésor de l’art préhistorique : une frise sculptée, gravée et peinte, unique au monde!” Mais plus encore il est rappelé que “le Centre d’interprétation du Roc-aux-Sorciers propose de découvrir ce patrimoine, au travers de scénographies innovantes et de restitutions taille réelle dont l’une est entièrement tactile” et puis en conclusion deux mots “Actuellement fermé”. Et oui, le Centre d’interprétation a été réalisé par la communauté de communes des Vals-de-Gartempe et Creuse. Nos bons élus savaient  alors le vanter avec superbe. Aujourd’hui, leur superbe est de tronquer les chiffres pour fermeture imminente.

Le département de la Vienne souligne qu’Angles sur l’Anglin abrite un patrimoine fermé au public pour des raisons de conservation

Vacances
Vacances

Pour le département de la Vienne, le site du Roc aux Sorciers et son Centre d’Interprétation participent (avec la grotte de la Marche) à valoriser le département dans le domaine de la préhistoire. Et là encore, une certitude. Le département aime. La preuve : Sur le site de l’Agence Touristique de la Vienne (l’agence créée et financée par le Conseil Général de la Vienne) nous lisons dans la rubrique “Patrimoine” : “Angles-sur l’Anglin, un des plus beaux villages de France, abrite un patrimoine rare et fermé au public pour des raisons de conservation. Il s’agit de la frise sculptée préhistorique du Roc aux Sorciers. Elle date de l’époque Magdalénienne, il y a 15000 ans. Cette frise, unique au monde, a été mise à jour en 1950. Elle est considérée comme l’un des plus importants sites d’art Paléolithique. Le centre d’interprétation du Roc aux Sorciers propose de découvrir une restitution innovante de ce site d’exception, en associant des scénographies pédagogiques et un spectacle multimédia. Après un parcours permettant aux visiteurs de remonter le temps et de s’immerger au cœur de la vie des Hommes à l’époque magdalénienne, le public pourra enfin découvrir cette frise inoubliable.”

La toute nouvelle Région Aquitaine-Limousin-Poitou Charentes n’a pas encore fini son inventaire

Petite histoire méconnue d'un CIRS qui ne voudrait pas se faire oublier
Petite histoire méconnue d’un CIRS qui ne voudrait pas se faire oublier

Dans la Région Aquitaine-Limousin-Poitou Charentes. Il n’y a pas photo. Le Roc aux Sorciers est en bonne place puisqu’il se situe au deuxième rang d’une grande spécialité régionale, l’époque Magdalénienne, alors que moins d’une dizaine d’abris sous-roche sculptés ont été répertoriés en Europe pour cette période. Et si nous en nommions quelques-uns, nous aurions : le Roc-aux-Sorciers (Angles sur l’Anglin – Vienne), la Chaire à Calvin (Mouthiers sur Boëme – Charente), l’abri du Roc de Sers (Sers – Charente), l’abri Reverdit (Sergeac – Dordogne), Cap Blanc (Marquay – Dordogne). Et encore bien d’autres sites connus pour leurs mobiliers et objets d’art comme la grotte de Lascaux (Montignac – Dordogne), la grotte du Pape (Brassempouy – les Landes), la grotte de la Marche (Lussac les Châteaux – Vienne), le site de la Madeleine (Tursac – Dordogne), le site de Laugerie-Basse (Eyzies de Tayac – Dordogne)… Un vrai trésor !

Pour l’Etat, le Roc aux Sorciers est un site orné unique au monde, mais plus encore

État de fait ! Alain Duval, l’ancien directeur du Musée d’Archéologie Nationale de Saint-Germain en Laye, est là
État de fait ! Alain Duval, l’ancien directeur du Musée d’Archéologie Nationale de Saint-Germain en Laye, est là

Pour l’Etat enfin, pas de doute. “La paroi du Roc aux Sorciers” est inscrite au titre des Monuments Historiques depuis 1955. On poursuit encore un peu plus loin. Nous entrons sur le site culture.fr, un site du Ministère de la Culture et de la Communication (http.//www.sculpture.prehistoire.culture.fr). Sur ce site, pas moins de quatre publications sont consacrées au site du Roc aux Sorciers dans lesquelles on peut lire dans le premier : “ce site magdalénien orné unique au monde”,  dans un second, “cet art pariétal se distingue nettement de celui des grottes ornées comme Chauvet ou Lascaux, où la sculpture est quasi absente”, un troisième informant de la mise en ligne du catalogue des collections de l’abri du Roc-aux-Sorciers présentant le mobilier archéologique issu des fouilles de Lucien Rousseau (1927-1939) et de Suzanne Cassou de Saint-Mathurin (1947-1964). Et qui ajoute en fin d’article : “Ce catalogue apporte des éléments scientifiques fondamentaux complétant ceux qui sont restitués au public dans le cadre du Centre d’interprétation du Roc aux Sorciers ouvert à Angles-sur-l’Anglin depuis le 21 mars 2008.” Est-ce à dire que le CIRS aurait du sens ?

Tous d’accord, et les archéologues il faut le souligner, sont unanimes

Vous voulez vraiment savoir pourquoi je suis venu ?
Vous voulez vraiment savoir pourquoi je suis venu ?

De nombreux sites et magazines spécialisés dans le domaine parlent régulièrement du site du Roc aux Sorciers. Il y en a tant qu’on ne peut s’arrêter à les lire tous. Pourtant l’un retient mon attention, c’est celui du site web “Hominidés”. Pourquoi ? Et bien tout simplement parce qu’on y apprend que Geneviève Pinçon qui était présente le 5 mars à 16 heures sur le parvis du Centre d’Interprétation du Roc aux Sorciers (CIRS) n’est pas qu’une simple archéologue locale, mais plutôt une spécialiste reconnue dans le monde de la préhistoire et qu’elle a poursuivi les travaux de Suzanne de Saint-Mathurin depuis son décès, qu’elle a publié seule ou avec des confrères tant français qu’étrangers de nombreux ouvrages. Elle n’était d’ailleurs pas la seule présente ce grand jour. Alain Duval, l’ancien directeur du Musée d’Archéologie Nationale de Saint-Germain en Laye (jusqu’en 1996) s’était lui aussi déplacé pour dire tout haut ce que les politiques voudraient passer sous silence : “la culture est ce qui est aujourd’hui sacrifié sur l’autel de « il faut faire des économies ». Voyez que nous faisons des économies, puisque nous bradons la culture”. D’autres et non des moindres, n’ont pu venir mais ils ont fait connaître leur point de vue puisqu’ils ont signé la pétition. Dans cette liste de plus de 2000 signataires, nous en avons repéré quelques-uns, le docteur Ian Morlay de l’institut d’Anthropologie de l’Université d’Oxford, Boris Valentin, professeur à l’Université Paris 1 – Panthéon-Sorbonne où il enseigne l’histoire de l’art et archéologie. D’autres encore sont espagnols (nombreux), australiens, américains, japonais, sont d’Afrique du Sud… En conclusion, le monde de l’archéologie est inquiet. Comment nos élus peuvent-ils avoir une telle méconnaissance de l’intérêt international porté sur la question ? C’est absurde.

La société civile, ça vous parle ?

Avec Michel Philippe, le CIRS devient une cause humanitaire
Avec Michel Philippe, le CIRS devient une cause humanitaire
Extrait d'une société civile grandeur nature...
Extrait d’une société civile grandeur nature…

Michel Philippe le directeur du musée du Grand-Pressigny était présent lui aussi. C’est au nom de la Ligue des Droits de l’Homme qu’il est intervenu. Il aurait été difficile de ne pas le remarquer lorsque d’une façon déterminée et militante, il a condamné ceux qui “avec une extrême violence, foulent aux pieds une équipe qui depuis des années a travaillé sans relâche pour mener le CIRS au stade de l’excellence”. Des professeurs d’écoles, de collèges, de lycées, des bibliothécaires, des responsables de musées, de simples citoyens ont encore motivé leur présence ou leur signature. Un autre est resté fort discret : Oscar Fuentes, docteur en préhistoire et jusqu’à présent directeur du CIRS. Pourquoi ? Absent tout simplement parce qu’il n’est pas autorisé à revenir sur le site du CIRS. Mais ne seraient-ce que de vilains ragots ? Une certitude pourtant, les responsables locaux n’ont pas voulu entendre la société civile. Ils ont fait fi de tout ! De tout, et principalement de la démarche citoyenne de Suzanne de Saint-Mathurin, propriétaire du site qui avait légué à l’Etat, le site, ses collections, ses archives, pour seulement le petit prix “d’ouvrir le site à la visite”. Dans leur amnésie, ils ont oublié l’intérêt que de grands spécialistes ont porté au projet, la qualité du travail des membres du comité scientifique qui s’était constitué pour la création du CIRS, jusqu’au nom de ceux qui se sont donnés au site : Lucien Rousseau, l’inventeur, l’abbé Louis Breuil, Suzanne de Saint-Mathurin, Doroty Garrod, Geneviève Pinçon, Jean Clottes, spécialiste de l’art rupestre reconnu mondialement, Jean-Michel Geneste, directeur scientifique de la grotte Chauvet, Paul Bahn, préhistorien Britannique, Gérard Bosinski, préhistorien Allemand, Jacques Jaubert, professeur à l’Université de Bordeaux, José Antonio Lasheras, l’ancien directeur du musée d’Altamira, qui vient très récemment de nous quitter, Oscar Fuentes… Oui, le Roc aux Sorciers a favorisé des rencontres, nombreuses et riches. Un vrai Bottin Mondain.

À tous ceux de la société civile...
À tous ceux de la société civile…

 

Pourtant pour cette dernière rencontre du 5 mars sur le parvis du CIRS, le comité de soutien aurait souhaité que les élus de la communauté de communes s’expriment sur cette fermeture et ses conséquences. Le comité aurait aimé que tous les propriétaires du trésor puissent se faire entendre. Cela ne s’est pas fait. Une habitante d’Angles sur l’Anglin a demandé si quelques représentants locaux étaient présents. Il n’y a pas eu de réponse. Mais qu’auraient-ils pu dire, s’ils avaient été là ?

L'auteur : Xavier Guillon

Rédacteur en chef et en os et profiteur d’espaces, il aime l’urbain et le crie haut et fort. En secret, il rêve de nature et prend régulièrement les chemins vicinaux.

3 commentaires

  1. Vendredi 13 mai 2016 – Communiqué du Collectif de soutien au Centre d’interprétation du Roc-aux-Sorciers :
    Le Centre d’interprétation doit donc ouvrir ses portes en juillet 2016… Quelle nouvelle au goût amer, à l’heure ou le CIRS a été vidé de ses équipes et que son directeur a été licencié…
    L’arrêt de l’exploitation du Centre d’interprétation du Roc-aux-Sorciers par la Communauté des Communes des Vals de Gartempe et creuse en janvier 2016, a marqué la fin d’une aventure culturelle et humaine de près de 15 ans. Porté à l’origine par M. René Barré, maire de la Roche-Posay et premier président de cette jeune Communauté des Communes, la mise en valeur du site préhistorique du Roc-aux-Sorciers, unique au monde, fut une expérience humaine riche et complexe, autour d’une vision culturelle et économique du territoire.
    En 2016, les élus de cette même collectivité, emmenés par son président, Daniel Tremblais, et ses quatre vice-présidents, Pascale Moreau, Jean-Pierre Joseph, Michel Favreau et Eric Bailly, ont ainsi scellé ce projet et ce site. Ils ont mis un terme au projet culturel, au service public et a vocation culturelle, moteur d’économie locale et de développement humain et social pour le “donner” au gestionnaire privé, à ce professionnel du tourisme tant attendu.
    Les dernières étapes ont été méthodiques. La reprise par la Communauté des Communes gestion publique en mars 2013 (après l’abandon du site par deux gestionnaires privées en 5 ans), est marquée par leur première décision, licencier l’ensemble des équipes de médiation en avril 2013. Le 12 avril 2016 c’est autour d’Oscar Fuentes, directeur du site depuis 2008 d’être licencié. Le lundi 9 Mars le conseil communautaire vote la délégation de gestion à Jean-Max Touron sur un bail Bail emphytéotique administratif concernant le château d’Angles-sur-l’Anglin et le CIRS pour une durée de 25 ans…
    Ce “don” fait à un privé de biens publics, réalisés, pour le CIRS, avec des investissements publics, est tout simplement révoltant et inadmissible venant de la part d’élus qui ont délégation à défendre les intérêts communs. Comment peut-on justifier ce bail de gestion à un privé sans aucune contre partie? Comment peut-on justifier que le seul loyer demandé au privé soit de 100e par an? Inadmissible! D’autant que le tout a été négocié dans la plus grande opacité. Sur quel cahier des charges Jean-Max Touron a-t-il été choisi? Sur quel projet scientifique, touristique et de médiation culturelle (que seul Oscar Fuentes, le directeur, pouvait assurer et qui a été licencié) Jean-Max Touron s’est-il engagé? Au bout de trois fois en 10 ans, Jean-Max Touron a enfin obtenu ce qu’il souhaitait visiblement. Et il apparaît que le licenciement indigne du directeur a plus été un objectif qu’une conséquence de la situation.
    A l’heure ou la Culture est délaissée au privé (comment peut-on encore penser que le gestionnaire privé fera du service public?), nous affirmons que plus que jamais, il est nécessaire que la culture soit à la portée de tous. On ne peut dans notre pays s’émouvoir de la montée de l’intolérance, des inégalités et dans le même temps participer directement à un cloisonnement de plus en plus évident de la France. La culture ne peut être l’apanage des grandes villes, des grands centres économiques et politiques du pays, sinon c’est accepter la mort inexorable de la culture en milieu rural, c’est mépriser une partie des citoyens, c’est sacrifier au nom d’une logique inacceptable de rentabilité monétaire et à court terme, l’impérieuse nécessité de fédérer les hommes et les femmes. La culture ne devrait pas être un luxe, elle est consubstantielle au bien-être de l’homme. Si comme SOGECI et Vert Marine en leurs temps (les deux anciens gestionnaires privés) Jean-Max Touron estime qu’il perd de l’argent, au bout d’un temps, qui garantira la pérennité du CIRS à long terme?
    Nous nous dressons contre la mise à mort de la culture par nos propres représentants, élus, qui devraient porter en avant le savoir-vivre en société, les biens communs et la culture comme valeur de partage. A l’heure des regroupements des territoires et de la fusion de Vals de Gartempe et Creuse avec l’agglomération de Châtellerault (bassin de près de 80.000 habitats d’après Pascale Moreau), il était plus que souhaitable que le CIRS reste en gestion publique bénéficiant d’une collectivité plus importante et pouvant lui apporter, une destination culturelle et touristique de qualité aux habitants de notre territoire.
    Le Roc-aux-Sorciers debout!

  2. Cool! That’s a clever way of loniokg at it!

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *